Les plantes amères

Publié le:
février 08, 2024
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Spirits & Beers

Préconisées dans notre alimentation en raison de leurs vertus pour la santé, les plantes amères présentent aussi de grands avantages gustatifs pour les boissons notamment spiritueuses. Retrouvez ici l’histoire de ces amers ou « bitters », breuvages hérités de notre patrimoine gastronomique et découvrez comment est perçue cette saveur unique.

 

 

Définition et utilisation des plantes amères

 

Des plantes aromatiques, mais aussi des fleurs, des fruits et des écorces offrent des bénéficies liés à leur amertume et se sont toujours illustrés dans différentes cultures et traditions pour leurs propriétés gustatives si caractéristiques. 

 

L’amertume, une saveur botanique recherchée

 

Comment reconnait-on une saveur ? La perception de la saveur suit un trajet de la langue au cerveau. Tout d’abord, la solubilisation de l’aliment se fait grâce à la salive, qui lubrifie et « dépose » les molécules de l’aliment sur la langue. Puis, les récepteurs spécialisés du goût, situés dans les cellules des papilles, détectent les cinq saveurs :

 

  • le sucré,
  • l’amertume,
  • l’acidité,
  • le salé
  • et l’umami (1).

 

Notre classification occidentale étant réductrice par rapport à des sensations gustatives plus complexes, les chercheurs nomment la fraîcheur (menthe), le piquant (moutarde, piment, gingembre) et l’astringent (airelles, thé, tanins) un « continuum de saveurs » (2). 

Liées traditionnellement au métabolisme et plus précisément au foie et à la digestion, le pissenlit, la chicorée, l’écorce de saule, la petite centaurée et la grande camomille sont des exemples de plantes médicinales réputées pour leurs principes actifs, leurs propriétés fébrifuges etc (3). Les aliments amers sont en effet nécessaires afin de stimuler la production de sucs digestifs, favorisant ainsi le fonctionnement du foie et des voies biliaires. Leurs propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires aideraient également à lutter contre le diabète, les maladies cardio-vasculaires, et les cancers.

Historiquement, c’est en Italie et en France que des recettes anciennes amères, souvent des élixirs ou des préparations thérapeutiques, ont été confectionnées puis commercialisées sous forme de liqueurs végétales. C’est ainsi qu’a été créée à la fin du XIXe siècle la liqueur de gentiane, à l’origine boisson des paysans d’Auvergne élaborée à partir des racines de la plante infusées dans du vin blanc. Longtemps écartés des habitudes alimentaires modernes et avec eux les effets potentiellement positifs sur notre santé, l’amertume et ses arômes complexes ont à nouveau la côte auprès des consommateurs, grâce aux cocktails, bitters et liqueurs revisités. 


A noter d’autre part que l’amertume concerne évidemment les bières dont les brasseurs mesurent l’intensité avec l’IBU (International Bitterness Unit) (4) ainsi que les vermouths (5), à base de vin associé à des épices et des plantes : l’armoise surtout, avec son goût caractéristique amer, mais aussi la gentiane, l’artemisia, la coriandre, le gingembre, la marjolaine, l’orange amère, la vanille, le clou de girofle, le thym, le génépi des Alpes (6) etc.

 

Les amers ou « bitters »

 

Ces infusions de plantes dans de l’alcool remontent en fait à l’Antiquité égyptienne, puis reviennent au goût du jour en France, avec la fameuse Chartreuse, et au XVIIIe siècle en Angleterre, où des herbes sont ajoutées aux vins importés d’Espagne. Très populaires dans la seconde moitié du XIXe siècle, les bitters, avant d’être servis en apéritif, en digestif ou en cocktail étaient ainsi surtout consommés pour leurs vertus curatives et vendus en officine (7). 

Aujourd’hui les amers ou « bitters » (traduction en anglais et allemand) désignent une boisson spiritueuse obtenue par macération, infusion et/ou distillation de plantes, d’herbes, d’écorces de fruits (d’oranges amères notamment) et de racines dans de l’alcool (8) neutre afin de conserver une amertume prépondérante.


Les ingrédients botaniques les plus fréquemment utilisés pour élaborer ces boissons amères sont :

 

gentiane no orange amere no quinquina no cascarille  no bigaradier no
La gentiane L'écorce d'orange amère La quinine La cascarille Le bigaradier

 

Souvent,  les préparations des grands fabricants de liqueurs et bitters comportent une adjonction de sucre afin d’adoucir le goût de leurs alcools.

 
 

Mécanisme biochimique de la perception amère

 

Le goût joue un rôle primordial dans les comportements alimentaires et nous permet de repérer les aliments riches en macronutriments, en électrolytes et pauvres en composés potentiellement toxiques. Les molécules amères altèrent par ailleurs les qualités gustatives des parties comestibles des plantes pour en assurer la survie et les protéger contre les herbivores. L'amarogentine est à ce titre la principale substance responsable de l'amertume très intense des racines de Gentiana lutea L. (9) Certains composés odorants génèrent aussi une saveur amère, comme le menthol ou le limonène (10).

 

Une compréhension « récente » de cette perception

 

Il y a près de vingt ans des récepteurs à l’amertume ont été identifiés, ce qui a permis de mieux comprendre les mécanismes biochimiques à l’origine de la perception de la saveur amère. La détection de ces molécules est due à une famille de récepteurs nommés TAS2R. L’être humain en possède 25 qui lui permettent de reconnaître un grand nombre de molécules amères (11). 

Parmi les nombreuses familles chimiques en contenant on trouve des lactones, des flavonoïdes, des pyranosides, des terpènes, des esters, des amides, des flavonoles, des alcaloïdes, des glucosides mais aussi des acides aminés, des lipides et des minéraux (12). 

 

Plantes et fruits à la saveur amère

 

Les flavanones sont présents dans le pamplemousse (narginine) et les flavonoles dans certains fruits immatures (quercitine) (13). De la théobromine présente dans le chocolat et le thé, à la caféine abondante dans le café, les alcaloïdes contribuent à donner un goût amer. La quinine, extraite de l’écorce du quinquina, est ainsi utilisée par les industriels dans les spiritueux. Cette molécule est également utilisée en tant que référence amère pour des analyses sensorielles. Car la sensibilité gustative varie selon les individus et par exemple, le goût du phénylthiocarbamide à la saveur amère n’est pas perçue par environ 35% de la population. (14)

Les composés amers : structure chimique, origine et seuil de détection

 

De nombreux végétaux comportent des molécules responsables de la saveur amère. Par exemple les crucifères, les endives, les brocolis, les artichauts, le chou de Bruxelles, le radis et le daikon (radis blanc) mais aussi le pissenlit, la roquette ou la chicorée, caractérisés par une amertume intense.


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Sources :

(1) BRIAND, Loïc et DUFOUR, Audrey. Comment reconnaît-on les saveurs?. 2017. https://hal.science/hal-01607013/

(2) https://observatoire-des-aliments.fr/qualite-dico/saveurs

(3) https://herbaluna.org/journal-herboriste/herbotheque/lamer-une-saveur-primitive-fondamentale/

(4) https://www.milliet.fr/saveurs-lamer-revient-en-force-quelles-boissons-proposer/

(5) https://laquintinyevermouthroyal.com/quel-gout-a-le-vermouth-est-ce-amer/

(6) https://laquintinyevermouthroyal.com/le-vermouth-comporte-combien-de-plantes-epices/

(7) https://www.mixologie.fr/magazine/fabuleuse-histoire-bitters-partie-1/

(8) https://www.spiritueux.fr/spiritueux/gentiane-amers/

(9) J. Bricout, Identification et dosage des constituants amers des racines de Gentiana lutea L., Phytochemistry,
Volume 13, Issue 12,1974, Pages 2819-2823, ISSN 0031-9422, https://doi.org/10.1016/0031-9422(74)80248-7.
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/0031942274802487

(10) Kataoka et al. 2008

(11) DELOMPRÉ, Thomas, SALLES, Christian, et BRIAND, Loïc. Saveur amère: De la molécule au comportement. Acad. Agric. Fr, 2020, p. 1-22.

(12) Laffitte et al. 2016

(13) Bravo 1998

(14) BRIAND, Loïc. Goût: des récepteurs à la saveur. In : Journées Aromagri. 2011. p. 38 p.

Spirits & Beers

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Graziella Riant-Dalibard

Graziella Riant-Dalibard

Head of BU Taste

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